La majorité des Etats répond aux défis des risques sociaux par des prestations sociales contributives et non contributives mais aussi par des allégements de charges fiscales, des actions pour le retour à l'emploi ou encore par des expérimentations comme un revenu universel...
Les prestations sociales désignent toutes les prestations en espèces ou en nature qui correspondent à des risques et constituent une forme de redistribution des revenus. Parmi celles-ci figurent les aides sociales qui font l'objet de cette étude. Selon le Drees en 2016, 4,15 millions de personnes fin 2016 étaient allocataires d'un minimum social et en comptant les conjoints et enfants à charge, ce sont 7 millions de personnes concernées, soit 11% de la population française, un tiers dans les DROM hors Mayotte.
Les dépenses de minima sociaux en 2016 allaient déjà au RSA (42,4%) puis à l'AAH (34,7%), au minimum vieillesse (ASV et ASPA), à l'ASS (10,3%) et aux autres minimums (2,9%).
Les minimums sociaux ne sont pas les seules aides sociales qui sont obligatoires ou facultatives, qui peuvent relever de l'Etat mais aussi des collectivités territoriales...
Alors que certains décideurs politiques estiment qu'il y a trop d'aides sociales, qu'elles sont souvent contradictoires ou qu'elles n'ont pas réduit les "inégalités de destin", la stratégie gouvernementale de 2018 affirme ses priorités :
- tout ne peut se résoudre par des allocations monétaires
- il faut remettre le travail au coeur du système
- il faut mettre en place un accompagnement socio éducatif pour lutter contre le déterminisme social.
Cette Lettre a pour objectif de rappeler le débat actuel sur ces allocations et en particulier sur trois projets, l'instauration d'un revenu minimum social garanti, le versement unique des allocations et l'instauration d'une allocation sociale unique.
Ces objectifs s'articulent avec une autre stratégie nationale transversale d'orientation de l'action publique avec la loi pour un Etat au service d'une société de confiance promulguée le 10 août 2018 (JO du 11/8).
Ce texte a pour ambition de réduire la complexité des parcours administratifs, d'alléger les normes et d'accélérer la dématérialisation des procédures au bénéfice des usagers.
On comprend mieux que le débat sur les prestations sociales et en particulier sur les aides sociales croise plusieurs intérêts, s'adapter aux technologies nouvelles, alléger les charges en personnel des administrations et établissements publics, encourager une politique sociale d'incitation au retour à l'emploi.
Quelles aides sociales ?
Le site gouvernemental mes-aides.gouv.fr classe les différentes aides sociales selon l'organisme chargé de les gérer :
Allocations familiales : Allocations familiales, Complément familial, Allocation de soutien familial, Prestation d'accueil du jeune enfant (allocation de base), Revenu de solidarité active, Aides au logement, Prime d'activité, Allocation aux adultes handicapés
Assurance maladie : Aide au paiement d'une complémentaire santé, Allocation supplémentaire d'invalidité, Couverture maladie universelle
Education Nationale: Bourses du collège et du lycée
Ministère de la cohésion des territoires : Allocations de logement social
Conseils départementaux : Allocation personnalisée d'autonomie
Chèque énergie
Pôle emploi : allocation de solidarité spécifique
Assurance retraite : Allocation de solidarité aux personnes âgées
Le Ministère des Solidarités et de la Santé ciblait en mars 2018 sur son site dix minimums sociaux :
- le revenu de Solidarité active (RSA)
- la prime d'activité (PA)
- l'allocation de solidarité spécifique (ASS)
- l'allocation équivalent retraite de remplacement (AER-R)
- l'allocation pour demandeur d'asile (ADA)
- l'allocation aux adultes handicapés (AAH)
- l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI)
- l'allocation veuvage (AV)
- les allocations du minimum vieillesse (ASV et ASPA)
- le revenu de solidarité (RSO), départements d'outre mer
Le revenu minimum social garanti : RMSG
Le Conseil économique social et environnemental dans un avis publié en avril 2017 rappelait que le système des minima sociaux a répondu aux insuffisances du système de protection sociale face à la montée de la pauvreté mais que l'accumulation de dispositifs "sur mesure" a débouché sur une difficulté liée à la complexité et au nombre de dispositifs qui pénalise les bénéficiaires et explique le non-recours.
C'est pourquoi le CESE préconisait un revenu minimum social avec une triple ambition :
- Garantir un revenu stable à toutes les personnes en situation de fragilité économique et sociale
- Simplifier l'architecture des minima sociaux pour favoriser l'accès aux droits
- Favoriser l'émancipation des bénéficiaires du RMSG pour une démarche d'accompagnement.
Ces deux dernières préconisations vont dans le sens du projet actuel préparé par le Gouvernement dont la philosophie est "d'enregistrer des gains de productivité en rationalisant et en simplifiant l'accès aux droits sociaux".
Le CESE inscrivait la dématérialisation des procédures dans le cadre d'une démarche globale d'inclusion numérique tout en garantissant le maintien d'un accueil physique pour les demandeurs.
Ce revenu minimum peut être entendu dans son sens large par une autre préconisation, le revenu de base ou encore universel, inconditionnel versé à tous et sans conditions ni obligations, un crédit social accessible à tous.
Une expérimentation avec différents scénarios possibles (allocations concernées, publics...) a été proposée par treize départements volontaires en insistant sur la valeur travail, des incertitudes actuellement demeurent sur son application.
Le versement social unique : VSU
Cette mesure devrait figurer dans le plan annoncé en septembre, elle a été confirmée par le Délégué interministériel en charge de la lutte contre la pauvreté en juin.
Un versement unique permettra aux allocataires de minima sociaux de percevoir le même jour plusieurs prestations.
Afin de réaliser le versement toutes les prestations concernées seront progressivement calculées sur la base des ressources du moment donné et non plus avec deux ans d'antériorité comme actuellement.
Seraient déjà concernés l'allocation adulte handicapé, le RSA et la prime d'activité puis les aides personnalisées au logement
Les avantages attendus grâce à l'échange automatisé de données entre administrations sont :
- la lutte contre le non-recours aux droits,
- la simplification de l'accès aux droits, à la prestation,
- le bénéfice pour l'usager d'allocations sans avoir à le demander,
- la lutte contre les erreurs et suspicions de fraude,
- l'obtention d'économies mécaniques dans une période de reprise économique.
L'allocation sociale unique : ASU
La prochaine étape de la réforme pourrait être le versement d'une allocation sociale unique mais considérant la complexité aucun calendrier n'est retenu à ce jour. Dans tous les cas la réforme ne figurera pas dans la prochaine loi de financement de la sécurité Sociale pour 2019.
A la demande du Premier Ministre, France Stratégie a été chargé en 2018 de deux rapports sur le sujet, en février et juin.
Deux scénarios ont été étudiés avec des gagnants et des perdants ! Certains ménages verraient leurs revenus diminuer et d'autres bénéficieraient d'une hausse de revenus avec l'ASU.
Ainsi l'ASU remplacerait le RSA, l'ASS, la prime d'activité, les allocations logement, l'allocation pour adulte handicapé ou encore l'allocation supplémentaire d'invalidité.
Les avantages attendus sont les mêmes que pour le versement social unique, économiques et techniques.
Conclusion
Le système de protection sociale français est devenu avec le temps complexe, presque indéchiffrable, accumulant des dispositifs publics et privés pour répondre aux risques sociaux mais aussi aux besoins évolutifs des populations, des politiques sociales et tout simplement aux caractéristiques démographiques, environnementales, économiques...
Les projets en cours s'interrogent dans tous les cas sur l'Etat providence et sous des objectifs de rationalisation, d'adaptation aux nouvelles technologies numériques (dématérialisation) conduisent à une nouvelle gouvernance mais aussi à une nouvelle approche de la solidarité.
Sources : extraits d'articles
Conseil économique, social et environnemental, Vie publique, Ministère des Solidarités et de la Santé, Drees, Caisse des dépôts des territoires, Ouest France, Le Monde, Solwii, BFM, Weka
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